C'est que tes yeux m'ensorcelaient. Et ton visage me faisait tourner et tourner et vasciller. Puis vomir. Te vomir dessus. Déverser tout mon bonheur. Un bonheur sanglant. Comme tes omoplates immaculés. Rouge qui éclabousse, rouge éclatant et rouge désespérant à la fois. J'avais entaillé ton dos pour mieux t'anoncer que je ne voulais plus jamais te quitter. Quitter ton corps trop attachant. J'avais vaguement essayé une lessive dite très performante. Qui enlève les taches corriaces. Mais mon cerveau se montra bien plus corriace encore. Et encore une fois je faisais un détour express aux toilettes avant de partir. On dit que les filles vont aux toilettes à deux. Je ne suis pas une fille. Pas à pas j'encombrais ton existence et je te hantais. Même tes ongles étaient maîtrisés par les miens. Je te devenais utile, irremplacable, physiquement pas détachable. Physiquement tu me plaisais mais l'attirance se faisait dans mon cerveau et réciproquement. Ma tête ne se passait plus de toi. Toi tu m'appartiens. J'ai même un droit de construction sur le terrain de ta vie. J'y construirai une vie remplie de mioches, et qui plus est tu n'en voudras pas. Mais j'ai le pouvoir de te faire obéir. Comme si tu m'appartenais. J'ai dû te payer cher tu sais. Tout ce qui est rare est cher. Mais toi t'étais pas rare. Pire que ça. T'essaie de panser tes plaies, les trous fraichements creusés. Et tu ne sais plus trop quoi penser. Mes mots deviennent encore plus dangereux que mon amour. Danger public sur la voirie. Je te vomis dessus encore un peu pour te faire déborder. Toi tu n'en peux plus de trop sourire. Tu m'appartiens je te dis. Et tu essaie de t'enfuir. Mais d'autres trous se creusent, plus profonds que jamais. Au moins aussi profond que le trou qu'il y a quand tu n'es pas là. Je suis un danger public pour ton petit coeur seulement sortit de son nid douillet. Tu es bien douillette aussi, ta peau se laisse défoncer, creuser, entailler, mordre, trouer, peler, couper, défricher, arracher.
Mes mots sont danger public. Au moins autant que mes maux. Et tu ne sais plus trop quoi panser.
Titre : Alain Souchon - Caterpillar