Moi j'regardais seulement. J'm'étais caché là, j'voulais piquer des car en sac dans la boîte à bonbons, et puis comme j'ai entendu du bruit j'ai fermé la porte sur moi. C'était pas très rassurant. Pas comme quand papa me prend dans ses bras, non, c'était plutôt comme le soir tout seul quand il pleut.
"- J'sais plus qui tu es, elle lui a dit, comme quand on joue à un jeu de rôle tous les deux, elle sait pas qui il faut attaquer, mais là elle avait l'air de le penser vraiment.
- J'sais qui tuer", il lui a dit avec un point d'exclamation derrière.
Les points d'exclamation on m'a apprit à l'école, avec les points d'interrogations aussi. Ceux qu'j'ai dit en premier c'est quand on parle fort. Et ceux d'après c'est pour les questions.
"- La détente est tout contre le doigt qui se crispe un peu. A bout portant je presse sur la gâchette. La victime regarde le fou dans les yeux, le flou dans les yeux et hurle au secours mais les voisins sont sortis. La balle s'encastre dans le petit corps trop fragile qu'on a jamais voulu toucher sous peine de le froisser. L'arbrisseau s'effondre et la bave déguouline. Le meurtrier parlera suicide et le gamin ira chez la belle mère. Les autres seront bouleversés le journal en parlera. Le cimetière pourrit un peu plus. La vraie victime, c'est moi."
J'ai pas tout bien compris. Les billes se sont éparpillées sur le sol sans que j'ai pu les retenir. Papa m'a regardé d'un drôle d'air. Et puis "un gamin ça se la ferme". Et moi je savais pas que j'aurais pu l'enfermer en prison pendant un bout de temps, juste avec deux trois petites confidences.
"- J'sais plus qui tu es, elle lui a dit, comme quand on joue à un jeu de rôle tous les deux, elle sait pas qui il faut attaquer, mais là elle avait l'air de le penser vraiment.
- J'sais qui tuer", il lui a dit avec un point d'exclamation derrière.
Les points d'exclamation on m'a apprit à l'école, avec les points d'interrogations aussi. Ceux qu'j'ai dit en premier c'est quand on parle fort. Et ceux d'après c'est pour les questions.
"- La détente est tout contre le doigt qui se crispe un peu. A bout portant je presse sur la gâchette. La victime regarde le fou dans les yeux, le flou dans les yeux et hurle au secours mais les voisins sont sortis. La balle s'encastre dans le petit corps trop fragile qu'on a jamais voulu toucher sous peine de le froisser. L'arbrisseau s'effondre et la bave déguouline. Le meurtrier parlera suicide et le gamin ira chez la belle mère. Les autres seront bouleversés le journal en parlera. Le cimetière pourrit un peu plus. La vraie victime, c'est moi."
J'ai pas tout bien compris. Les billes se sont éparpillées sur le sol sans que j'ai pu les retenir. Papa m'a regardé d'un drôle d'air. Et puis "un gamin ça se la ferme". Et moi je savais pas que j'aurais pu l'enfermer en prison pendant un bout de temps, juste avec deux trois petites confidences.
"Si tu parles, tu meurs. Si tu ne parles pas, tu meurs. Alors parle et meurs."
"Ne baisse pas les bras : tu risquerais de le faire une heure avant le miracle."
Titre : Alain Souchon - J'ai dix ans"Ne baisse pas les bras : tu risquerais de le faire une heure avant le miracle."