Je ne suis pas celle que vous attendiez. Elle m'a laissé vivre, m'a abandonné à mon territoire vert de quelques centimètres carré. Elle a contourné mon pourtour avec rigueur, elle a tondu mes copines et m'a abandonnée. Il faut dire que depuis que j'ai éclot je suis la plus belle. Mes pétales s'étalent sans détail nuisible, je suis blanche à souhait et j'ai attiré les papillons les plus tendres, beaux, majestueux. J'embaume mon territoire, je domine les herbes les plus hautes. Elle se rapproche de moi, avec des ciseaux pointus qui m'éblouissent. Elle coupe méticuleusement les brins qui dépassent et me regarde attentivement. Sort une machine dont je ne connaissais pas l'existence. Les êtres sur deux pattes sont très invetifs, ils inventent des tonnes d'objets, je doute de leur utilité. Elle approche ce qu'elle appelle objectif de mon coeur jaune. Elle me prend par dessous.
J'aime me gorger de soleil. Me pâmer devant les moineaux qui atterrissent pour grignoter les cerises qui sont tombées pas loin. Observer les violettes se déployer. Sentir les gouttes se déposer sur moi plus ou moins fortement. Me laver de mes journées chaudes d'été quand je regardais les gamins jouer dans la mini piscine. Une fleur c'est pas si bête. Les marguerites savent tuer le temps. Elles ont appris à aimer leur courte existence. Elles voient bien tout, mais personne les écoute. Les fourmis passent à côté sans trop faire attention. Quelques arraignées espèrent qu'on se prenne dans leurs toiles, mais elles n'ont aucune chance que ça arrive un jour. Des pieds nous écrasent, des mains nous cueillent, des lèvres nous embrassent, des chiens nous arrachent puis nous recrachent.
La vie d'une marguerite est belle, dure et elle finit vite.
Titre : Henri Salvador - Petite fleur
Bref bref bref .
C'est en marguerite que tu t'es métamorphosée ?